Culture : Aux Archives départementales, le déménagement est une science

À peine installés dans leurs locaux provisoires de La Bâtie-Neuve, en janvier 2022, les 20 agents des Archives entamaient le travail préparatoire à leur retour dans le bâtiment rénové. Il fallait bien 2 ans pour préparer cette opération hors norme. Démonstration.

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Des étagères mobiles comportant les nombreux documents classés aux Archives départementales - Agrandir l'image, fenêtre modale
©Stéphanie Cachinero

« Le travail préparatoire au déménagement à venir a commencé par une campagne de bilan » rappellent Pierre Fabry, directeur, et Alice Ducastaing, chef du service des Fonds. Une tâche rendue difficile par le fait que, depuis 2022, les archives haut-alpines sont provisoirement stockées sur 4 sites : La Bâtie-Neuve, Saint-Louis, aux Archives de l’Isère et dans le bâtiment historique de Gap où certaines salles n’ont pas été impactées par les travaux.

Objectif : répartir les fonds d'archives en fonction de critères comme le volume ou la cohérence de leur catégorie, leur état matériel… Début 2023, un groupe projet, composé de 10 agents représentant tous les métiers des archives, a été constitué pour faire des propositions d’implantation dans le nouveau bâtiment. En s’appuyant sur les données du bilan, et en tenant compte de 3 critères essentiels, ils ont choisi où localiser les documents pour leur bonne conservation.

Critère n°1 : rendre rapidement accessibles les documents les plus demandés

Il s’agit ici de déterminer la fréquence d’utilisation des documents : sont-ils souvent demandés en salle de lecture ou régulièrement utilisés par les agents dans le cadre de leurs recherches ? Si oui, il faudra qu’ils soient rapidement accessibles, donc dans des salles proches du premier étage. Parmi les archives les plus communiquées, on peut citer la presse, et notamment le « Dauphiné libéré ». Les documents numérisés, accessibles depuis un poste informatique, peuvent eux être stockés physiquement plus loin, dans les étages supérieurs. Certains documents de grande valeur patrimoniale, souvent les plus anciens, bénéficient d’un traitement « de faveur » à proximité de sorties de secours pour être rapidement mis à l’abri en cas d’accident comme un incendie.

Critère n°2 : adapter le rangement aux format des documents

16 salles de rangement, appelées « magasins », sont disponibles dans le nouveau bâtiment. 3 d’entre elles sont dédiées à des produits très spécifiques : photographies, plans et documents hors format, comme des objets (maquettes, uniforme, médailles…). Les 13 autres salles sont équipées de rayonnages mobiles ou fixes. Les rayonnages mobiles permettent de stocker un grand volume de documents dans un espace restreint. Ce sont des étagères qui coulissent sur des rails et restent collées les unes aux autres jusqu’à ce qu’on ait besoin d’un document et qu’on les écarte pour créer une allée. Elles conviennent bien aux archives standardisées et peu fragiles du XXe siècle. Les rayonnages fixes consomment plus d’espace, par définition. Ils sont destinés aux documents plus atypiques, comme des anciens registres dont les formats variaient beaucoup. On ne pourrait pas prendre le risque de les écraser sur des rayonnages mobiles et ils supportent plus difficilement d’être déplacés.

Critère n°3 : anticiper l’évolution des fonds

Dans la mesure où certains fonds vont croitre dans le temps, on doit laisser des espaces libres dans les étagères. Ils seront comblés au fil du temps en gardant leur cohérence, sans avoir à tout déplacer. C’est le cas des fonds des notaires ou des fonds des communes qui conservent leurs documents patrimoniaux pendant 75 ou 100 ans avant de les transmettre aux Archives départementales. Aussi les documents stockés aux Archives ne sont pas figés. On les déplace parfois pour les numériser ou les restaurer. On peut alors choisir de les classer différemment. Leur volume peut évoluer. Ainsi certains documents se trouvaient « à l’étroit » dans l’ancien bâtiment et quelques-uns ont pu être malheureusement écornés ou comprimés. Il faut alors les restaurer et leur laisser un espace suffisant en procédant à un reconditionnement.

Un enchaînement précis

Pour le déménagement, un phasage précis a été établi. Les documents stockés à La Bâtie-Neuve seront rapatriés les premiers. Une mission confiée à un déménageur patrimonial qui doit aussi se coordonner avec le fournisseur de rayonnages. « C’est là que ça se complique, explique Alice. Il va falloir récupérer les rayonnages de la Bâtie pour le nouveau bâtiment, alors qu’ils supportent encore des archives, grâce à un jeu de chaises musicales. » Puis viendront le tour des archives stockées en Isère, celles du site Saint-Louis et, en dernier, celles qui n’ont jamais quitté le bâtiment en travaux mais qui devront changer de place. Un travail de dépoussiérage a commencé les concernant et, quand c’est possible, on les range à leur emplacement définitif. Dans tous les cas, les déménageurs sont spécialisés dans le travail avec des documents patrimoniaux.

Les archives en chiffres

  • 14

    km de linéaire d’archives en 2024

  • 300 000

    documents

  • 3

    grands silos comprenant 16 magasins spécifiques de 200 m²

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