Insertion, Logement: Fonds de solidarité logement : le Département toujours en lutte contre la précarité énergétique

Tendre vers le plein emploi. C’est l’objectif que s’est fixé la loi du 18 décembre 2023 en cours de déploiement sur notre territoire. Avant d’en arriver là, il aura fallu près d’une année de préparation, de concertations, de brainstormings. Pas question ici d’un léger ripolinage, mais d’un changement de paradigme : une approche systémique de l’accompagnement des demandeurs d’emploi reposant sur un réseau pour l’emploi (RPE) où chaque acteur met son expertise au service de tous ses partenaires ? Et surtout des Haut-Alpins pour qui il n’aura pas suffi de traverser la rue pour (re)nouer avec l’emploi. Le tout en collant au plus près de la réalité et des spécificités de notre territoire.
Alors oui, la loi donne le ton : inscription automatique et systématique des personnes accompagnées à France travail (ex Pole emploi), mise en place d’un système d’informations partagé entre tous les acteurs, harmonisation des critères d’orientation que l’on pousse la porte d’un Département (RSA), d’une Mission locale (moins de 26 ans), de Cap emploi (personnes handicapées) ou de France Travail. « L’idée est de fluidifier les parcours des demandeurs d’emploi, de prendre en compte leurs problématiques et freins (contexte social et familial, problèmes de mobilité, accès au logement, niveau d’études…) et d’éviter toute rupture dans leur accompagnement », expliquent Lucie Garcia, référente du programme départemental d’insertion, et Amandine Pommier, numéro 2 du service Insertion au sein du Département.
Pour cela, chaque personne ne sera accompagnée que d’un référent unique, qui pourra évoluer en fonction des besoins. Un jeune qui n’a plus l’âge d’être suivi par une Mission locale pourra, par exemple, être orienté vers le RSA, sans avoir à raconter une énième fois sa vie, les démarches déjà entreprises… « Les éléments clés de son parcours figureront sur son dossier numérique, consultable par les professionnels qui l’accompagneront. De quoi mieux coordonner les actions et dispositifs qui lui seront proposés », résume Amandine.
Pour la mise en musique (sous l’oeil attentif de France Travail), c’est au niveau des comités départementaux pour l’emploi (CDPE) que ça se passe. Instance « de pilotage, de concertation, de coordination et de suivi » co-présidée par les préfets et présidents des Départements (une co-gouvernance inédite). Dans nos montagnes, Dominique Dufour et Jean-Marie Bernard l’ont réuni pour la première fois le 14 novembre 2024.
La mise en œuvre concrète revient, pour sa part, au Département (qui accompagne et suit dans les Hautes-Alpes 2 700 foyers bénéficiant du RAS). Plus précisément à la « chefferie de projet ». Un terme grandiloquent qui ne doit pas ternir le caractère essentiel de cette entité composée d’experts de terrain : opérateurs d’insertion professionnelle, assistantes sociales, secrétaires d’insertion, chefs d’agence territoriale, conseillers pour l’emploi en insertion… une vingtaine d’agents se réunissent tous les mois. Leur rôle ? Faire des propositions ancrées dans le réel.
Dans les Hautes-Alpes, ça fait longtemps que l’on travaille en interaction avec la Mission locale, Cap emploi…
En parallèle, les membres du RPE (dont les représentants siègent par ailleurs au CDPE) se retrouvent une fois par trimestre. L’occasion « d’échanger sur nos pratiques en planchant ensemble sur des cas pratiques, d’expliquer nos dispositifs respectifs, de renforcer nos relations de travail. Dans les Hautes-Alpes, ça fait longtemps que l’on travaille en interaction avec la Mission locale, Cap emploi… C’est l’avantage d’un petit département où chaque acteur est rapidement identifié. Ça a été un vrai avantage pour nous, on ne partait pas de rien. Même si le fait de sanctuariser tous ces temps d’échanges, au-delà des missions du quotidien, demande à chacun beaucoup d’énergie », confie Amandine Pommier, à la tête de la « chefferie de projet ».
Pour leur part, les agents du Département ont saisi cette opportunité pour réinterroger leurs pratiques, faire émerger de nouvelles façons de faire. Depuis quelques mois, ils expérimentent d’ailleurs une nouvelle Dynamique de parcours (lire ci-après).
Si les grandes lignes et directions sont tracées, le chemin vers le plein emploi n’est pas encore figé dans le marbre : les Hautes-Alpes suivent cap tout en s’adaptant aux vents qui souffleront jusqu’en 2027, date à laquelle la loi plein emploi sera entièrement déployée.
Casser les codes, les vieilles habitudes. Dans le cadre de la loi pour le plein emploi, les opératrices d’insertion professionnelle du Département ont embarqué une trentaine de bénéficiaires du RSA sur un chemin qui dénote et détone. Et ce jour-là, c’est baskets aux pieds que ça se passe, au gymnase de Puymaure, à Gap.
« On est un peu des cobayes. Mais quand on m’a parlé du projet Dynamique de parcours, j’ai tout de suite été volontaire », raconte Maxime, 27 ans, adossé au mur, en nage. Ce jeudi 13 mars, pas de costume-cravate pour lui. Short, tee-shirt, baskets noirs. Sur ses épaules, un chasuble orange fluo. « J’avais un peu peur qu’on nous propose un programme à base d’ateliers qui sentent la poussière, entre quatre murs, face à un intervenant qui déroule son discours que l’on écoute passivement ». Rien à voir dans cette salle de l’école Puymaure, à Gap. Thomas, animateur sportif au Dalhir (mandaté par le Département), enchaîne les consignes et règles du jeu. Sur le lino vert, Steven, Sharazad, Lucien, Angélique, Marie, Lucie… sont à fond.
Les encouragements fusent, les applaudissements saluent les phases de jeu engagées. « Je suis d’une nature introvertie, ça me sort de ma zone de confort », relate le jeune homme, le sourire de la fierté désormais sur les lèvres. Pour Lucie aussi, c’est un défi : « J’ai des problèmes de coordination assez prononcés. Et là, ça me donne confiance en moi. Ça nous fait aussi rencontrer du monde. Avant ce programme, j’avais tendance à rester chez moi, à me laisser tomber dans une spirale infernale », raconte la demoiselle dans une salve de mots. Une énergie et un entrain qui contrastent avec la dureté du récit.
Avant ce programme, j’avais tendance à rester chez moi, à me laisser tomber dans une spirale infernale »,
Lucie, bénéficiaire du RSA suivie par le Département
Pour Thomas, le constat est sans appel : « Entre la première séance, début janvier, et maintenant, je vois une grosse progression. Ils sont beaucoup plus sûrs d’eux, ils croient davantage en leurs capacités. C’est exactement là-dessus que l’on travaille à travers le sport. Une belle dynamique s’est instaurée. »
Des progrès que notent aussi Anne Launay, Stéphanie Borgia, Delphine Dumanois et Agnes Fambertasse, opératrices d’insertion professionnelle (OIP). Elles aussi ont chaussé leurs baskets.
Quand on transpire ensemble, ça crée des liens, autres que ceux entre une OIP et un bénéficiaire du RSA, reçu en MDS dans un bureau. L’occasion, également, pour Delphine de prendre quelques instants pour discuter avec Sophie (le prénom a été modifié), visage fermé, le regard rivé sur l’écran de son portable, assise par terre un peu à l’écart. Ce qu’elles se diront à voix basse restera entre elles. « Ça nous permet d’avoir des moments plus informels et privilégiés avec les personnes que nous suivons. Et de croiser les regards entre collègues sur certaines situations », confient les OIP.
Pendant ce temps, Steven, la petite trentaine, reste focus sur le jeu. Ces séances, il les apprécie particulièrement. « Mais tout le parcours est vraiment bien. Il n’y a pas longtemps, nous sommes allés visiter la chambre des métiers. Pendant 20 ans, je suis passé devant tous les jours sans savoir ce que c’était, ni ce qu’on y faisait. » D’ici peu, celui « qui ne se doutait pas qu’on pouvait passer des diplômes au-delà de 30 ans, ira y remplir une demande pour intégrer un apprentissage en mécanique moto. »
Sifflet final. Une signature sur la liste d’émargement. Rendez-vous l’après-midi même pour un atelier sophrologie à la Maison des solidarités Gap-Cézanne. Histoire de les aider à donner un nouveau souffle à leur trajectoire de vie.
Depuis le 2 décembre 2024, les opératrices d’insertion professionnelle du Département testent, avec une trentaine de bénéficiaires du RSA, un nouveau dispositif de leur propre cru : Dynamique de parcours.
Une expérimentation qui s’inscrit dans le cadre de la nouvelle loi pour le plein emploi, dont le volet 3 vise à renforcer l’accompagnement des personnes les plus éloignées du marché du travail. L’idée ? Construire un programme qui allie ateliers animés par des conseillers numériques, sport, culture, visites de structures de formation, d’entreprises d’insertion… Une quinzaine d’heures hebdomadaires consacrées à leur insertion (temps qui pourrait par ailleurs devenir obligatoire). Pour un suivi à 360° qui conjugue diagnostic, découvertes et rencontres avec des entreprises. L’objectif ? Aboutir à un projet dont les bénéficiaires seront les propres acteurs. « On est les premiers, il y aura peut-être des ajustements à faire, mais ce serait vraiment bien que ça continue après nous », espère Steven, 32 ans, peut-être futur apprenti en mécanique moto.