Insertion : Plan de lutte contre la pauvreté
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Les Départements, acteurs majeurs de la stratégie nationale contre la pauvreté
Au début de l’été 2019, le Département des Hautes-Alpes et l’État unissaient officiellement leurs forces pour donner vie à la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté sur le territoire haut-alpin, pour les trois ans à venir. Les objectifs affichés : prévenir toute « sortie sèche pour les jeunes sortant de l’aide sociale, mettre l’accent sur l’insertion des bénéficiaires du Revenu de solidarité active (BRSA), redonner et revaloriser le travail social au service de toutes les familles ».
Une mise en œuvre adaptée aux territoires
Dans ce cadre, l’État annonçait dès 2019 mettre 135 M€ sur la table pour soutenir les Départements dans la mise en œuvre du plan national en l’adaptant à leurs spécificités. Dans les Hautes-Alpes, territoire rural et de montagne, qui a connu la plus forte croissance du nombre de BRSA au niveau régional ces sept dernières années (+22 %), les problèmes de mobilité se font particulièrement criants. On remarque aussi que les mères célibataires et les séniors semblent plus exposés à la précarité. Pour ne rien arranger, une grande partie du marché du travail local se base sur des emplois saisonniers, souvent précaires et peu qualifiés. Ce qui oblige « à une évolution continuelle », souligne Amandine, référente Programme départemental d’insertion.
Une adaptation perpétuelle infléchie également au niveau national, où l’on tâtonne encore pour trouver la meilleure voie à suivre. De quoi interroger les professionnels du social, quant à leur organisation : « Il va falloir la revoir, prédit Mohamed, chef du service Insertion. Plusieurs pistes sont évoquées. Il est notamment question d’un potentiel service public que l’insertion qui viendrait en remplacement de Pôle emploi et pourrait donner une place centrale aux Départements. »
« Changement de paradigme »
Pas facile dans ces conditions de savoir où diriger ses pas, et surtout ses politiques. Il n’empêche qu’un véritable « changement de paradigme » est en train de s’opérer au sein de la collectivité départementale pour reprendre les termes de David Blanc, à la tête de la direction Territoriale et transversale de l’action sociale – MDA, avec l’approche « Aller vers ». Au plus près des Haut-Alpins les plus en difficulté, aussi bien au niveau du logement, de la santé, de la formation que de l’insertion.
Cette nouvelle méthodologie, encore en cours d’affinage, s’inscrit pleinement dans le cadre des actions imposées par le gouvernement (orientation des BRSA vers un référent unique, leur accompagnement social renforcé). Si les choses sont encore en construction, « la dynamique est en marche », se félicite Mohamed.
Quels budgets au service des Haut-Alpins les plus fragiles ?
Côté budget, outre les 2M€ qu’accorde tous les ans le Département à l’insertion, la déclinaison départementale de la lutte contre la pauvreté peut compter sur quelques moyens. 405 382 € en 2019, financés à 50-50 par l’État et la collectivité. Et 569 532 € pour 2020 (302 516 € de la part de l’État et 266 516 € de la part du Département).
Des actions très concrètes déclinées sur le territoire haut-alpin
Le gouvernement a choisi de s’appuyer sur les Départements pour déployer la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. Comment cela se concrétise-t-il dans les Hautes-Alpes ? Éléments de réponse.
La stratégie nationale « pilotée à partir des territoires » se « mettra progressivement en œuvre […] grâce aux Départements, chefs de file de l’action sociale », pouvait-on lire dans un communiqué de presse gouvernementale à l’occasion du lancement effectif du plan de lutte contre la pauvreté en février 2019. Un plan entré dans sa phase opérationnelle dans les Hautes-Alpes, quatre mois plus tard.
Décliné en 16 fiches action la première année, 21 en 2020 (dont les financements courront jusqu’en juin 2021), le plan haut-alpin porte déjà ses premiers fruits : réduction du délai entre l’arrivée d’un nouveau bénéficiaire dans le dispositif du Revenu de solidarité active (RSA) et son orientation (114 jours en 2019 contre 129 en 2018) ; hausse du nombre de nouveaux entrants orientés en moins d’un mois (24 % en 2019 contre 14,3 % en 2018).
Plateforme Speed
Parmi ces 21 actions, certaines ayant fait leurs preuves lors de la première année ont été reconduites. À l’image de la plateforme « Socle pour une employabilité et une embauche durable » (Speed), portée par le Centre populaire d’enseignement.
Au travers d’ateliers collectifs et d’entretiens plus individualisés, Speed répond à deux objectifs. D’une part, la mise en valeurs des compétences des bénéficiaires du RSA, qui n’ayant plus été confrontés au monde du travail de longue date en arrive à douter d’eux même. Et d’autre part, la reprise des savoir-être de base (arriver à l’heure par exemple), qui peuvent ne plus faire sens pour les personnes les plus isolées. Dans le but de rebooster les participants, sont également proposés des rencontres avec des employeurs, du coaching emploi, des immersions en milieu professionnel, des visites d’entreprises.
D’une quarantaine de places en 2019-2020, le dispositif est passé à 60 pour la session 2020-2021 (pour une subvention État-Département s’élevant à plus de 27 900 €). « Nous visons ici plus particulièrement les femmes élevant seules leurs enfants et les seniors », confie Amandine, référente Programme départementale d’insertion.
Nouveau chantier d’insertion à Veynes
Un public également ciblé dans le cadre de la création d’un chantier d’insertion grâce à une subvention globale de 40 000 € (50 % État, 50 % Département), débloquée au titre de la stratégie de lutte contre la pauvreté.
En partenariat avec la communauté de communes Buëch Dévoluy et la structure d’insertion par l’activité économique Nez au vent, une nouvelle ressourcerie verra, ainsi, le jour à Veynes d’ici quelques mois. De quoi donner l’occasion à des Haut-Alpins en insertion de remettre le pied à l’étrier de l’emploi.
Aide à la mobilité
Autre nouveauté, du côté du Gapençais cette fois, avec le Parcours mobilité pour l’emploi expérimenté au sein de l’Agence Gap-Durance (regroupant les Maisons des solidarités de Bonne et Fangerots). Ouverte à une vingtaine de places encore cette année, cette action s’adresse « aux personnes ayant des difficultés avec l’apprentissage. Avant de s’inscrire dans une auto-école, nous leur proposons des cours de code ultra individualisés, sous forme de soutien renforcé assuré par Services conseils formation », explique Amandine.
Une fois le premier jalon posé, le chemin vers le permis reste encore long et onéreux. « En entrant dans ce dispositif, les personnes aidées bénéficient de facto de l’aide du Département au permis de conduire, soit une aide de 800 € : 100 € pour le code et 700 € pour la conduite », précise Amandine.
Et histoire d’aller au bout de la logique, cette action prévoit le renouvellement de la subvention octroyée au garage solidaire gapençais de Hautes-Alpes emploi relais. Ces deux actions ont été subventionnées à hauteur de 20 000 € au global.
Voilà, très concrètement, comment la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et pour l’accès à l’emploi devient une réalité haut-alpine.